Questions légales de la communauté

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Lors d'arrestations dans le cadre d'actions de désobéissance civile, qu'est-ce qui se passe dans les faits?

Premières étapes

Au moment de l’arrestation, la personne se voit lire ses droits.

Elle doit être identifiée par son nom légal, sa date de naissance ainsi que son domicile.

Il y aura une fouille sommaire de sa personne. Cette fouille a pour objectif d’assurer la sécurité du policier qui va vérifier si la personne arrêtée est armée. Cette fouille a aussi pour objectif de préserver des éléments de preuve qui seraient sur la personne accusée.

La personne arrêtée peut ensuite être amenée au poste de police ou, comme à Montréal, à l’un des centres opérationnels. Il y aura ensuite une procédure d’écrou avec une autre fouille. Les effets personnels de la personne seront placés dans une enveloppe qui peut être récupérée au départ en cas de libération.

Durant cette détention, il y a une rencontre avec l’enquêteur durant laquelle il est recommandé d’exercer son droit au silence et son droit d’avoir recours sans délai à l’avocate de son choix. C’est l’enquêteur qui prend généralement la décision de la mise en liberté selon le profil de l’accusé et la nature du crime. Si la personne n’est pas libérée à partir du poste avec une promesse ou une citation à comparaître, alors elle sera amenée détenue pour comparaître devant un juge dans les 24 heures qui suivent.

Avant la comparution

C’est également l’enquêteur qui remet le dossier au bureau de l’autorisation des plaintes. Des procureurs à l’autorisation des plaintes sont chargés d’étudier les dossiers après l’arrestation et avant la comparution pour confirmer les accusations proposées par les policiers ou les rejeter. L’enquêteur et les procureurs travaillent étroitement ensemble.

Spécifique à la désobéissance civile

Le processus criminel est, dans ses grandes lignes, identique pour toutes les infractions. Les tribunaux ne font pas de distinction entre les dossiers de désobéissance civile et les autres infractions criminelles. La désobéissance peut également être perçue par les tribunaux comme une banalisation du comportement criminel. C’est un contexte qui peut être pris en compte au moment du prononcé de la culpabilité ou durant la sentence. Il s’agit toutefois d’un couteau à double tranchant. Par exemple, un avocat de la défense peut miser sur le contexte de désobéissance civile pour démontrer l’engagement social de la personne accusée, mais un procureur de la couronne y verra plutôt une absence de remords de la part de la même personne. Un avocat peut également présenter le comportement criminel comme étant une erreur de jugement, alors qu’un procureur de la Couronne y voit un crime planifié et, donc, plus sophistiqué que le manque de jugement temporaire.

Plaider coupable ou demander un procès

Durant le processus criminel, une décision doit être prise quant à la culpabilité de la personne. La personne accusée peut plaider coupable librement et volontairement pour tenter de négocier une peine plus clémente. La personne peut également demander un procès. À procès, la personne accusée peut présenter une défense, présenter une requête ou simplement tester la force de la preuve de la poursuite. Une personne sera déclarée coupable si le juge d’instance est convaincue hors de tout doute raisonnable de sa culpabilité. Si la personne soulève un doute raisonnable ou si un doute subsiste malgré l’ensemble de la preuve de la poursuite, alors la personne sera acquittée. Un acquittement est aussi possible au terme d’un arrêt des procédures. Un arrêt peut être prononcé comme réparation en cas de violation d’un ou des droits constitutionnels de la personne accusée soulevée dans une requête en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés. Par exemple, une personne peut ne pas présenter de défense, mais plutôt une requête alléguant une violation à son droit constitutionnel d’être jugée dans un délai raisonnable. Si la personne accusée est déclarée coupable, alors le dossier passe à l’étape de la sentence. La sentence est la punition ou la conséquence du verdict de culpabilité. Certains crimes ont des peines minimales obligatoires.

Sentence

 La sentence peut impliquer l’ouverture d’un casier criminel. Si la sentence est absolution, il n’y aura toutefois pas de casier. L’absolution peut être inconditionnelle et conditionnelle. Parmi les conditions possibles, notons un rayon à respecter autour d’une personne, un immeuble ou un lieu, le paiement d’une amende, l’exécution d’un certain nombre de travaux communautaires et se soumettre à une période de probation, avec ou sans suivi probatoire. Toutes ces modalités peuvent être rattachées à d’autres peines. Par exemple, il est possible de payer une amende dans le cadre d’une absolution conditionnelle ou de payer une amende qui sera créatrice d’un casier criminel. Nous n’avons repéré aucune décision de jurisprudence au Canada ayant entériné la défense de désobéissance civile dans une cour criminelle. Pour le droit, il n’est pas possible de se soustraire aux conséquences d’un geste criminel sur la base de la désobéissance civile.

Défense de nécessité

Il existe une défense de nécessité en droit criminel au Canada. Toutefois, les conditions y permettant l’accès sont très strictes. Nous n’avons répertorié aucune décision de jurisprudence au Canada ayant entériné la défense de nécessité dans un contexte de désobéissance civile dans une cour criminelle.


La Cour suprême a tracé les limites de la défense de nécessité dans l’arrêt Perka c. La Reine, 1984 CanLII 23 (CSC), [1984] 2 RCS 232. Il y a trois conditions pour donner ouverture à un moyen de défense fondé sur la nécessité. Premièrement, la preuve doit démontrer un danger imminent et immédiat. Le caractère d’urgence est essentiel. Deuxièmement, l’accusé ne doit pas avoir accès à une autre solution raisonnable et légale. Troisièmement, il doit y avoir une proportionnalité entre le mal infligé et le mal évité. Ces principes ont été confirmés une seconde fois par la la Cour suprême en 2001 dans R. c. Latimer, 2001 CSC 1 (CanLII), [2001] 1 RCS 3. Latimer était accusé du meurtre de sa fille de douze ans atteinte de paralysie cérébrale grave. La défense de nécessité a été rejetée dans ce cas, la Cour suprême concluant qu’aucune des trois conditions n’a été vraisemblablement rencontrée. L’enfant ne se trouvait pas dans une situation urgente, l’accusé avait accès à une autre solution (soit endurer la situation difficile) et l’exigence de proportionnalité est difficile à rencontrer dans le cas d’un meurtre. Latimer a purgé sa peine à partir de janvier 2001 et a obtenu sa libération conditionnelle complète en décembre 2010.

Comment tempérer les risques d'arrestation lors d'actions de perturbation?

Une personne avocate (ou le HUB) ne peut répondre à cette question.


Vous pouvez notamment consulter la page réduction de risques .

Quels recours a-t-on comme personne lectrice ou membre d'un média indépendant face à de l'intimidation en ligne faite par des personnes policières suite à un article satirique appelant à définancer la police?

Les tribunaux ont reconnu que dans un contexte de cyberintimidation, l’intimidation prend généralement la forme de commentaires contenant des insultes sur les médias sociaux ou la publication des informations personnelles (Doxxing).

Il est pertinent de distinguer le fait d’être témoin d’une intimidation et le fait d’en être victime.


En effet, une personne victime d’intimidation est le sujet de cet acte et en subit les conséquences. Nous croyons que seule la victime de cyberintimidation peut agir devant une
cour civile pour obtenir une réparation monétaire pour compenser les dommages qu’elle a subi. Une personne qui est témoin d’intimidation comme lecteur.ice du contenu des commentaires intimidants ne peut pas avoir subi les mêmes dommages que la victime. Dans tous les cas, il y a un délai de trois ans pour réclamer les dommages. Nous vous conseillons de vous adresser à un-e avocat-e en droit civil pour évaluer ces options plus en détail.


La cyberintimidation peut devenir un comportement criminel. Il sera alors question de harcèlement criminel. Une plainte peut être déposée au poste de police pour entamer le
processus criminel. Il n’y a pas de moyen d’entamer une démarche pour déposer des accusations sans passer par les policiers. D’autres formes d’intimidation du ressort du droit criminel incluent la diffusion non consensuelle de photos intimes.


Étant donné que la personne visée dans la question est un agent policier, il serait pertinent de considérer la possibilité d’une plainte auprès du Commissaire à la déontologie policière. Le Commissaire sera alors chargé de déterminer si le comportement de l’agent constitue un acte dérogatoire. La plainte doit être déposée au plus tard un an après la date de l’événement en question ou la connaissance de cet événement. N’importe quelle personne, comme un témoin par exemple, peut déposer une plainte au niveau en déontologie policière. Il n’y aura toutefois pas d’acte dérogatoire s’il est établi que le policier a exprimé une opinion personnelle dans le cadre d’un débat public.


Les autres outils législatifs repérés au niveau de l'intimidation sont plus pertinents dans un contexte scolaire d’intimidation, notamment avec la définition de l'intimidation prévue dans la Loi sur l’instruction publique.

Est-ce contre la loi de cloner un site internet afin d'en détourner le sens?

Le hacking n’est pas automatiquement un comportement criminel. Les enjeux relatifs à la neutralité du web nous indiquent qu'il s’agit plus d'un enjeu de politiques publiques que d’un enjeu juridique pour le moment. Enfin, l’absence de comportement criminel n’empêche pas une poursuite au civil, par exemple les demandes d’injonction visant à cesser un comportement particulier, les recours entourant les droits d’auteur ainsi que les poursuites en diffamation.

Quels sont les risques des personnes administratrices de pages de meme incitant au sabotage ou invitant à rejoindre des groupes comme les blacks blocs?

Cette question soulève des enjeux de partage de responsabilité sur le contenu entre les créateurs de contenus, les diffuseurs de contenu et ceux qui hébergent le contenu.


En règle générale, les personnes administratrices des pages ou groupes sur les réseaux sociaux se doivent de gérer la page et veiller que le respect y règne. Ainsi, elles sont tenues de surveiller et de filtrer les publications des internautes ou des membres afin de garder un espace virtuel exempt de toute forme d’intimidation, de menaces ou de harcèlement. Cette surveillance doit se faire avec prudence et diligence dans le but d’arrêter toute propagation des propos intimidants ou diffamatoires.


À défaut de quoi, l’administrateur omettant d’agir ainsi, engage sa responsabilité, tout comme celui ayant commis l’infraction de cyberintimidation.

Au civil
Il a été établi par la Cour supérieure au Québec que la personne qui permet fautivement la propagation de propos diffamatoires engage sa responsabilité. (Vaillancourt c. Lagacé, 2011
QCCS 3781). En effet, la responsabilité de l’administrateur n’est pas engagée seulement par la publication des propos diffamatoires par une personne membre de la page, mais il faut aussi
que cet administrateur ait permis fautivement leur propagation. Autrement dit, il devrait être aussi en défaut d’exercer son obligation de surveillance des publications et avoir omis de filtrer et d’empêcher leur propagation.Ainsi, en engageant sa responsabilité civile vis-à-vis de la victime d’intimidation, l’administrateur d’une page sur les réseaux sociaux doit réparer le préjudice pour les dommages causés à cette victime.
Au criminel

En matières criminelles, pour que l’administrateur soit accusé, il doit avoir commis l’acte prohibé par la loi. Il ne suffit pas d’avoir été passif, en évitant de réagir à une publication sur sa page. Il n’est donc pas possible d’accuser au criminel une personne qui n’a pas commis lui-même l’acte prohibé par la loi, n’a pas aidé la personne ayant publié les propos prohibés, ne l’a pas assisté ou encouragé à agir ainsi.

Également, tout dépend de la manière dont la publication sur le sabotage est faite. Le droit permet la libre expression des opinions de toutes les opinions dans une certaine mesure.. Toutefois, si un discours haineux est utilisé, alors ceci peut constituer une infraction criminelle, car c’est du contenu prohibé. Si une image harcelante à l’encontre d’une personnalité publique avec des signes de blessures est utilisée, alors ceci peut également constituer une infraction de harcèlement criminel pour son auteur et la personne qui la
diffuse.


Si une victime possible de sabotage est identifiée, alors ceci peut constituer une menace de méfait à l’encontre de cette personne.


Nous notons que l’affaire Dis son nom qui implique des personnes administratrices d’une page de dénonciation de violences intimes viendra clarifier plusieurs aspects de la responsabilité en ligne. Nous vous conseillons de vous adresser à un-e avocat-e en droit civil pour évaluer les options sur la responsabilité des administrateurs de contenu en ligne plus en détail.

Quels sont les risques pour une personne qui mentionne avoir participé à une action illégale/de désobéissance civile dans une entrevue ou de façon publique?

Il s’agit d’un aveu extrajudiciaire. Ces déclarations, comme toutes les autres déclarations publiques, peuvent être utilisées contre une personne accusée dans un procès criminel.


Certaines infractions criminelles impliquent la présence sur les lieux comme l’accusation de méfait suite à une occupation non autorisée des bureaux d’un politicien. D'autres accusations nécessitent des éléments de preuve supplémentaires en plus de la présence sur les lieux, comme le méfait issu du vandalisme qui nécessite une preuve du dommage à la propriété.


Dans le cadre d'une accusastion criminelle formelle liée à une occupation, la présence sur les lieux constitue une preuve.


Si vous avez des corrections ou des ressources complémentaires à nous partager en lien avec ce contenu, vous pouvez contacter isabelle@lehub.ca.


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