Mythes sur la production et le recyclage des métaux
Quel est l'objectif d'apprentissage de ce texte?
Ces mythes servent bien entendu les intérêts du capital et de l'État, en légitimant la perpétuation et la croissance de l'industrie minière. Il importe de déconstruire ces mythes qui menacent les populations humaines et l'ensemble du vivant. Le but de cette série d'articles est d'offrir un contre-discours à cette propagande d'écoblanchiment menée par les forces capitalistes coloniales.
- D'où viennent les informations?
À la fin de cet article, on retrouve les pages de ce livre qui sont citées. Les liens vers les autres ressources utilisées pour rédiger le mythe sont également intégrées à même le texte.
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Au départ de la mine, les métaux sont directement utilisables par les industries.
Les fosses et les galeries des sites miniers ne sont qu'une partie du complexe industriel nécessaire à la fabrication des métaux. En effet, le minerai extrait de la mine contient encore un mélange de plein d'éléments différents.
Plusieurs étapes subséquentes permettront de concentrer la teneur du métal souhaité dans l'échantillon de roche qui quitte la mine. [1] [1]
Étapes de traitement du minerai

Tout d'abord, la roche dynamitée devient en écrasante majorité des déchets miniers. Prenons l'exemple d'une mine de cuivre, du village Minas de Riotinto, dans le sud de l'Espagne. 99,6 % des roches qui y sont extraites sont des «stériles», c'est-à-dire qu'elles contiennent trop peu des métaux souhaités pour être exploitables. Ces stériles sont entassées dans des énormes tas sur les sites miniers, à raison de 2 300 tonnes par heure. Le reste, 0,4 % des roches extraites, est de la chalcopyrite (CuFeS2), un minerai composé en partie de cuivre, qu'on cherchera ensuite à isoler.
Après, le minerai souhaité est transporté, par des camions appelés dumpers, et des convoyeurs (des genres de tapis roulants géants), vers les appareils de concassage, de tri et de broyage. À la sortie de ces procédés extrêmement énergivores, on obtient une poudre de roche.

Ensuite commence la concentration du minerai. Dans l'exemple de la mine de cuivre mentionné ci-dessus, la poudre de chalcopyrite est plongée dans des énormes bains chimiques remplis d'hydrocarbures. Cette étape, nommée flottation, permet aux résidus de cuivre de remonter à la surface. Ceux-ci sont ensuite rebroyés, pour obtenir un «concentré» de cuivre, d'une teneur de 23 %. Il reste encore à purifier la substance jusqu'à une teneur de plus de 99 % pour qu'elle puisse être utilisée par les industries.
Pour ce faire, le «concentré» de cuivre est ensuite transporté par camion et par bateau jusqu'en Chine, vers des fonderies. Dans ces usines, d'immenses fours feront évaporer le souffre et les autres impuretés du produit. On obtient alors des blocs métalliques de 98 % de cuivre.
Exemple de fonderie à Rouyn-Noranda |
![]() À Rouyn-Noranda se trouve une usine de ce type: la Fonderie Horne. Depuis des décennies, cette usine traite des matières minières provenant des quatre coins de la planète, notamment de Russie, de Singapour et du Brésil. Cette usine de Glencore, entreprise minière impliquée dans plusieurs scandales de fraude et de pollution [2], rejette chaque année des tonnes de métaux toxiques [3], qui se propagent dans l'air via des particules poussiéreuses et des gouttelettes d'eau. Par exemple, plus de 212 tonnes de métaux lourds ont été rejetés par la Fonderie Horne en 2021 [4]. Ces substances menacent gravement la santé de la population de Rouyn-Noranda, l’exposant à des risques de cancers beaucoup plus élevés que la moyenne nationale. Depuis 2022, le collectif Mères au front de Rouyn-Noranda se mobilise contre la Fonderie Horne. ![]() |
La dernière étape de traitement est le raffinage. Les blocs de cuivre seront remis sous forme liquide, puis plongés dans des bassins chimiques contenant entre autres du sulfate de cuivre et de l'acide sulfurique. Soumis à l'électrolyse, le cuivre est alors séparé des dernières impuretés et atteint des teneurs entre 99,99 %, pour fabriquer des bobines, des câbles, etc., et 99,9999 % pour les composantes électroniques des ordinateurs et des cellulaires.
Bref, après être extraits des sols des sites miniers, les métaux passent par toute une chaine de transformation qui est extrêmement polluante. Les mines ne sont que le départ d'un long parcours qui mènera à la fabrication des métaux utilisés par les industries. [2]

Le recyclage des métaux permettra de réduire l'extraction minière.
Comme expliqué dans le mythe « Il y a assez de métaux pour décarboner les économies actuelles », électrifier les transports et les industries actuelles nécessiterait l'équivalent de dizaines, voire de centaines d'années d'extraction minière au rythme actuel.[3] Le recyclage des ressources minérales déjà en circulation ne serait donc pas suffisant et il faudrait quand même continuer d'augmenter l'extraction minière pour combler les besoins de cette économie capitaliste prétendument « verte ».
Efficacité limitée
De plus, le recyclage des métaux ne permet de récupérer qu'une fraction des matériaux initiaux. En effet, l'usure, la dégradation ainsi que les étapes de collecte et de recyclage des métaux causent des pertes non négligeables de métaux. Par exemple, après un cycle de recyclage, il ne reste que 55 % de la masse initiale de nickel, puis seulement 20 % après le deuxième cycle.
Difficultés techniques
Ensuite, le recyclage des métaux n'est pas aussi simple que le recyclage du carton. Dans le premier cas, il s'agit d'une activité industrielle qui implique plusieurs substances hautement toxiques, de grandes quantités d'eau et d'énergie : « recycler les métaux nécessite de les extraire du produit qui les contient, de les séparer puis de leur redonner une pureté utilisable par l'industrie : ce n'est pas une mince affaire. » [4]

Procédés de recyclage |
![]() Le recyclage des chars électriques, par exemple, est beaucoup plus complexe que ne le prétendent les lobbys automobiles, comme on peut le constater à la lecture du mythe « Un char électrique est moins polluant qu'un char à gaz ». Le recyclage des appareils technologiques est encore moins concluant, étant donné la petitesse des composantes. En effet, l'entreprise Fairphone, qui fait de la recherche-action dans le domaine du recyclage, a réussi à créer des appareil qui se recyclent à 45 % seulement. [5] Ces procédés génèrent de surcroît des déchets toxiques, à l'instar des activités minières classiques. Loin d'être une solution parfaitement « propre », le recyclage des métaux nécessite en fait des procédés similaires au traitement des minerais extraits originellement des mines :
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Recyclage des stériles
En plus de toucher les métaux déjà consommés par l'industrie, l'argument du recyclage est souvent mobilisé à propos de ces tonnes de roches rejetés par les mines, les « stériles ». En effet, si ces roches contiennent trop peu du métal principalement recherché dans une mine pour être traitées, elles contiennent néanmoins d'autres métaux qui peuvent, eux, être exploités s'ils s'y trouvent en quantité suffisante. Mais ne vous détrompez pas : l'industrie ne rate aucune occasion de faire des profits. Les minières exploitent déjà les métaux secondaires ou tertiaires des gisements depuis le XVIe siècle! [7]
Le traitement de ces stériles exige de les broyer plus finement, dégageant ainsi plus de matières toxiques dans l'environnement. Il faut ensuite les traiter à l'aide de procédés similaires à ceux qui sont employés pour les autres métaux. Bien évidemment, il s'agit d'activités extrêmement polluantes et destructrices des écosystèmes, tels que décrits dans les mythes «Les procédés d'exploitation minière ont évolué : leur empreinte environnementale est moins élevée qu'aux siècles précédents.» et «Au départ de la mine, les métaux sont directement utilisables par les industries ».

En somme, le recyclage des métaux ne peut suffire à lui seul: « L'exigence de recycler les métaux doit bien sûr être posée, mais de façon secondaire à l'impératif de faire massivement décroître l'offre et la demande de matières extraites. » [8] Le recyclage des métaux doit impérativement être couplé à une révolution complète du système politique actuel et à une sortie du régime capitaliste colonial.
Conclusion
Pour conclure, dans cet article, on a vu que :
- L'exploitation des métaux ne s'arrête pas à la frontière de la mine : il faudra encore soumettre les minerais à plusieurs procédés avant d'être utilisables par les industries : concassage, tri, broyage, flottation, purification et raffinage.
- La purification des métaux est effectué dans des fonderies, soit des usines où d'immenses fours réchauffent les métaux afin que les impuretés s'évaporent.
- La Fonderie Horne est une usine située à Rouyn-Noranda qui rejettent des quantités dangereusement élevées de métaux toxiques dans les environs, menaçant la population locale.
- Le recyclage des objets métalliques nécessite plusieurs opérations industrielles complexes et polluantes. L'efficacité du recyclage est également limitée : beaucoup de pertes sont inévitables.
- Le « recyclage » des stériles passe par les mêmes procédés miniers que pour les gisements premiers.
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