Mythes sur la mine « écoresponsable »
Néanmoins, les élites capitalistes aiment bien prétendre que la mine d'aujourd'hui serait aurait été révolutionnée. À leurs dires, elle n'aurait rien avoir avec la mine de charbon de la première révolution industrielle (1750-1850). Justin Trudeau lui-même a proclamé qu'il serait acceptable d’envisager des exploitations minières, forestières ou de chasse sur des territoires protégés, « si c’est bien fait et responsable ». [1]
Mais comme nous le verrons dans les prochaines sections, l'industrie minière n'est pas et ne pourra jamais être écologique ni responsable.Ce texte présente les impacts globaux des mines sur les écosystèmes et sur le climat. Elles permettront de comprendre plus en détails en quoi consiste l'extraction minière, et ses interactions avec l'environnement à chacune de ses étapes. On constatera ainsi en quoi l'exploitation minière ne pourra jamais être écoresponsable, contrairement à ce qu'en disent les minières.
- Quel est l'objectif d'apprentissage de ce texte?
Ce texte fait partie d'une série d'articles qui déconstruisent plusieurs mythes entretenus par les élites économiques et politiques et les minières sur leur projet de «transition énergétique». Celle-ci est propulsée à toute vitesse par les gouvernements, les lobbys et les instances internationales néolibérales, sous couvert de la protection de l'environnement. Cependant, il importe d'investiguer les enjeux logistiques et industriels derrière une telle « transition énergétique », ainsi que les réels intérêts en jeu.
Ces mythes servent bien entendu les intérêts du capital et de l'État, en légitimant la perpétuation et la croissance de l'industrie minière. Il importe de déconstruire ces mythes qui menacent les populations humaines et l'ensemble du vivant. Le but de cette série d'articles est d'offrir un contre-discours à cette propagande d'écoblanchiment menée par les forces capitalistes coloniales.
- Comment naviguer à travers ce texte?
Les mythes ci-dessous peuvent se lire séparément, isolément, à l'envers, en désordre et en pyjama. Chaque réponse est indépendante des autres. N'hésitez pas à choisir les mythes qui attirent plus votre attention ou à les lire au complet.
- D'où proviennent les informations?
La plupart des informations qui figurent dans cet article proviennent du livre La ruée minière au XXIe siècle : Enquête sur les métaux à l'ère de la transition, publié par Celia Izoard en 2024, aux éditions de la rue Dorion. Cet essai est un compte-rendu d'une recherche exhaustive menée par la journaliste d'enquête Celia Izoard.
À la fin de cet article, on retrouve les pages de ce livre qui sont citées. Les liens vers les autres ressources utilisées pour rédiger le mythe sont également intégrées à même le texte.
Les procédés d'exploitation minière ont évolué : leur empreinte environnementale est moins élevée qu'aux siècles précédents
Contrairement aux mythes entretenus par les capitalistes, les procédés industriels d'exploitation des métaux sont globalement les mêmes qu'aux XIXe et XXe siècles : dynamitage des gisement pour extraire la roche, concassage, tri et broyage des roches, traitement et concentration du minerai par des procédés chimiques et raffinage pour en faire des métaux utilisables par les industries.[1]
Les nouvelles techniques utilisées en sites miniers sont même encore plus nuisibles pour l'environnement que celles des siècles précédents. Tel que démontré dans le mythe Il y a assez de métaux pour décarboner les économies actuelles, les gisements de métaux sont de moins en moins concentrés : cela signifie que l'on doit extraire de plus en plus de roches, de plus en plus loin et de plus en plus creux, pour obtenir une même quantité d'un certain métal.[2] Pour compenser cette augmentation des volumes de roches brutes extraites, les nouveaux procédés amorcent le traitement des minerais directement sur le terrain, et non en usine.[3] Cela augmente les impacts destructeurs sur les écosystèmes.
Les nouveaux procédés miniers
Lixiviation en tas |
Depuis les années 1970, la lixiviation - opération qui consiste à dissoudre les éléments d'un minerai à l'aide d'un solvant (acide sulfurique ou cyanure par exemple) - se pratique directement sur place, dans des mines d'or, de cuivre ou d'uranium. On disperse alors une substance qui dissout le minerai, afin de récupérer en plus grande concentration l'élément recherché. Les tas de minerais aspergés reposent sur des revêtements, qui sont sujets à des fuites ou des ruptures, alors qu'auparavant, cette étape se déroulait dans des bassins d'usines de traitement, bien mieux isolés des écosystèmes[4]. ![]() |
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Lixiviation in situ |
Un autre sorte de lixiviation est pratiquée aujourd'hui dans les mines d'uranium. Elle consiste à injecter les solvants (acide sulfurique ou soude) directement dans les sous-sols, avant de pomper le mélange concentré. Cela permet de diminuer la quantité de roches extraites, mais diffuse dans les sols et les eaux souterraines des substances hautement toxiques[5]. |
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Déplacement de montagne
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Autre exemple : dans les années 1960, on a commencé à exploiter le charbon en déplaçant tout bonnement des montagnes[6]. Cette technique maintenant répandue, le mountaintop removal, est apparue dans les Appalaches, aux États-Unis. Cette opération consiste à dynamiter les sommets de montagnes pour accéder aux gisements. Les roches de la montage sont alors stockés dans les vallées avoisinantes, ensevelissant du même coup leurs écosystèmes. |
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Ainsi, l'essentiel des procédés miniers sont les mêmes qu'auparavant. Les nouvelles techniques (lixiviation en surface ou souterraine, déplacement de montagnes), quant-à-elles, sont de plus en plus invasives. Elles visent à compenser les faibles concentrations des gisements et à protéger les profits d'exploitation minière, non pas l'environnement[7].
Les nouvelles technologies rendent les mines plus écoresponsables.
Selon ce que les entreprises minières prétendent, les technologies numériques permettraient de diminuer les impacts environnementaux des procédés d'exploitation. Mais qu'en est-il vraiment?
Les objectifs réels des nouvelles technologies minières
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Prenons par exemple l'exploration, un processus qui sert à déterminer combien et quels minéraux se trouvent dans un gisement avant de l'exploiter. L'exploration se fait par satellite depuis les années 1990. Cela a l'avantage de limiter le forage et le carottage sur le terrain, donc d'être moins invasif sur les sols en question. Toutefois, la technique d'observation par satellite permet surtout aux minières d'économiser sur les coûts d'exploration, de détecter plus efficacement les gisements, et ainsi d'ouvrir plus rapidement de nouvelles mines. Le but premier de ce nouvel usage n'est donc pas de diminuer la pression sur l'environnement, mais d'augmenter l'exploitation et les profits miniers.[8] |
L'empreinte environnementale des nouvelles technologies minières
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D'autre part, tous les appareils numériques utilisés pour technologiser les mines (capteurs, caméras, ordinateurs, antennes, etc.) contiennent eux-mêmes de grandes quantités de métaux rares. Il faut donc miner toujours plus pour produire les appareils nécessaires pour « moderniser » les mines. Un paradoxe qui n'aide en rien à économiser les ressources minérales... Et une fois produits, ces gadgets génèrent des données (data) qu'il faut stocker et traiter à l'aide de giga-serveurs qui sont eux-mêmes extrêmement métaux-vores, énergivores et polluants.[9] |
En bref, selon une ingénieure qui travaille au sein d'une grande entreprise minière, « la géolocalisation, le big data, et toutes les autres technologies numériques ne permettent qu'une amélioration des rendements. Mais les technologies minières en tant que telle n'ont pas évolué depuis un siècle. La seule différence est l'augmentation majeure de la taille des installations et de la quantité de déchets ».[10]
La mine zéro carbone existe.
Cette affirmation est complètement fausse : la mine zéro carbone est une pure fiction inventée par les minières pour redorer leur image. Toutes les mines du monde utilisent des hydrocarbures à l'heure actuelle.
Barrières techniques
Malgré que certaines minières se vantent d'alimenter leurs installations avec des énergies « vertes » comme le solaire et l'éolien, ces sources ne peuvent combler l'ensemble des besoins énergétiques d'une mine : les technologies actuelles ne le permettent tout simplement pas. En effet, comme l'explique une ingénieure qui travaille au sein d'une grande entreprise minière, « ces énergies ne sont pas assez stables pour faire fonctionner une mine ou une usine de traitement [...] Elles ne pourraient servir qu'à alimenter les infrastructures connexes comme des bureaux ». [11] De plus, pour fournir ne serait-ce qu'une partie de l'énergie d'une mine, il faudrait des infrastructure solaires, éoliennes, hydroélectriques et/ou nucléaires démesurément grandes.



Par exemple, pour électrifier un seul camion transportant des roches dans les mines d'Europe de l'Est nécessiterait l'équivalent de 100 batteries de Tesla. [12] Pour donner une idée de l'ordre de grandeur, une batterie de Tesla S pèse environ 600 kg, dont 62,6 kg de lithium. [2]
Ces batteries, éoliennes et panneaux solaires nécessiteraient donc des quantités faramineuses de métaux. Il faudrait encore ouvrir de nouvelles mines pour fournir les métaux des infrastructures énergétiques des mines «décarbonées»... Bref, on est loin de l'objectif de réduire l'exploitation minière et son impact environnemental.
Exemples
Atalaya Mining
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La mine de Rio Tinto en Espagne, exploitée par Atalaya Mining, se vante d'être « la première mine propre d'Espagne qui fonctionnera à l'énergie photovoltaïque ». Mais qu'en est-il vraiment? En fait, Rio Tinto est dotée d'une centrale solaire de 75 765 panneaux, d'une surface de 60 hectares (l'équivalent de 480 piscines olympiques), qui comble seulement le quart de la demande énergétique de la mine.[13] |
Nouveau Monde Graphite
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Plus près d'ici, Nouveau Monde Graphite présente un projet de mine à Saint-Michel-des-Saints et prétend que celle-ci sera 100 % électrique. [3] Or, comme on l'a démontré ci-dessus, les infrastructures techniques qui permettraient d'opérer une mine uniquement à l'électricité n'existent pas à l'heure actuelle. La Coalition Québec Meilleure Mine, du réseau Mining Watch Canada, rappelle également qu'au-delà des gaz à effet de serre, une mine est un désastre environnemental, puisqu'elle détruit des écosystèmes entiers, en plus de polluer l'air, l'eau et la terre sur des étendues pouvant aller jusqu'à des centaines de kilomètres carrés avec des contaminants hautement toxiques : «la mine de graphite à ciel ouvert de Saint-Michel-des-Saints ouvrira un cratère de presque trois kilomètres de long dans une région habitée et réputée pour ses attraits naturels, en plus d’accumuler des résidus acides ». Il faut ainsi se rappeler qu'en plus de consommer des combustibles fossiles, une mine est polluante et écocidaire à plusieurs autres niveaux. |
Bref, les mines ne peuvent pas fonctionner uniquement aux énergies vertes: elles dépendent encore grandement des hydrocarbures pour la majorité de leurs procédés d'exploitation. Elles sont donc inévitablement responsables de quantités faramineuses d'émissions de gaz à effet de serre, ainsi que de divers polluants toxiques. Si vous voyez «zéro carbone» dans les communications de minières, il s'agit sans aucun doute d'écoblanchiment (greenwashing).
Les mines ne génèrent pas de déchets polluants, seulement des roches.
La gestion des déchets miniers est un enjeu de taille. Comme nous le verrons, la quantité de déchets en jeu est gigantesque et leur toxicité est élevée. Les déchets miniers constituent une menace considérable pour les écosystèmes.
Au soi-disant Québec, les déchets miniers sont de l'ordre de 100 millions de tonnes par année, soit l'équivalent du poids de plus de 1,5 million de tanks en service dans l'armée étasunienne. [14] [4] Cela représente 20 fois la quantité d'ordures générées par la population et les entreprises de la province. Mais d'où viennent tous ces déchets?
Déchets solides
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![]() Lors de l'extraction minière, seule une fraction des roches extraites contient des particules du métal recherché. Concrètement, moins de 2 % des roches extraites seront conservés et envoyées aux étapes de traitement. Par exemple, les gisements de cuivre exploités aujourd'hui sont en moyenne concentrés à 0,4 % de chalcopyrite, un minéral qui contient entre autres du cuivre. [15] Donc, le reste, soit 98 % à 99,9 % des roches extraites, est stocké sur les sites miniers, formant des énormes collines. Ces déchets rocheux sont appelés «stériles», car du point de vue des entreprises, ils ne peuvent être exploités ni créer de profits. Les stériles contiennent néanmoins toutes sortes de substances qui réagissent avec l'air et l'eau de pluie, diffusant des liquides acides et des métaux toxiques aux alentours. [16] |
Déchets liquides
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En plus de ces stériles, les mines actuelles produisent des quantités astronomiques de déchets liquides. En effet, la flottation et le raffinage, des étapes du traitement du minerai, consomment des millions de litres d'eau chaque jour, asséchant les sources d'eau des écosystèmes et des populations locales. [17] À la fin des procédés industriels, ces eaux chargées d'éléments toxiques et/ou radioactifs (arsenic, mercure, cadmium, plomb, etc.) sont déversées dans d'immenses lacs de résidus à ciel ouvert. |
Et une fois produits, ces déchets restent hautement toxiques et polluant pendant des milliers d'années. Les minières doivent donc sécuriser ces résidus, pour éviter qu'ils ne contaminent les écosystèmes alentours. Bien entendu, les entreprises mettent le moins possible d'efforts là-dessus, et les installations prévues à cette fin sont presque toujours déficientes.
Barrages miniers
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![]() Le barrage minier est une autre infrastructure utilisée pour isoler les contaminants de l'environnement. Contrairement aux barrages hydroélectriques qui sont conçus à l'avance pour résister à une capacité prévue et calculée d'eau, les barrages miniers sont tout simplement des tas de stériles amassées au fur et à mesure de l'extraction. Le volume des boues toxiques augmente aussi progressivement pendant l'exploitation, ce qui accroît la pression sur les digues improvisées... jusqu'à ce qu'elles rompent. Chaque année, plusieurs barrages miniers s'effondrent dans le monde : on parle de plus de cinquante ruptures de la sorte depuis le début du XXIe siècle. [18] Par exemple, « en janvier 2019, au Brésil, le barrage de la mine de fer de Brumadinho s'est rompu, une coulée de boue de 12 millions de mètres cubes a tué 270 personnes, anéanti un pont, un village et toute la faune et la flore sauvages sur des dizaines de kilomètres carrés. » [19] |
Membranes géotextiles
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Pour tenter d'isoler et de sécuriser ces mers contaminées, on recouvre le roc de membranes géotextiles qui ont une durée de vie... de 150 ans à peine. [20] Après cela, les acides, métaux lourds et autres substances toxiques pourront se diffuser dans le sol sans obstacle... |
Ainsi, aucun équipement minier n'a, à ce jour, réussi à empêcher les étendues gigantesques de déchets boueux de contaminer les écosystèmes alentours. Les «parcs à résidus» et «bassins» miniers rejettent des substances hautement toxiques dans l'environnement, contaminent les nappes phréatiques, engloutissent des vallées et polluent des rivières sur des centaines de kilomètres. [21]
La mine du XXIe siècle offre de bonnes conditions de travail.
Plusieurs minières se vantent d'être «équitables» et d'avoir à coeur la santé et la sécurité de leurs travailleur·euses. Depuis que les ONG et divers groupes de pression ont dénoncé le scandale des mines de cobalt au Congo, les entreprises sont soucieuses de se dissocier leur image publique de ces pratiques génocidaires. Elles tentent ainsi d'établir une fausse frontière temporelle entre les mines d'«avant» et les mines d'«aujourd'hui». Mais dans les faits, les mines d'hier comme d'aujourd'hui exploitent leurs employé·es pour accomplir des travaux extrêmement dangereux, en échange de salaires de misère, sans avantages sociaux, et bien sûr en réprimant toute tentative de mobilisation.
Mine de Potosí
Commençons par un exemple historique : la mine de Potosí, en Bolivie, cette « célèbre mine d'argent bolivienne dont l'exploitation, qui perdure, aurait fait huit millions de morts depuis le XVIe siècle ». [22] La ville de Potosí se situe au pied du mont Cerro Rico, qui est surnommé à juste titre « la montagne qui dévore les hommes vivants ».

Aujourd'hui, les employé·es de la mine sous-terraine construisent elleux-mêmes les piliers des galeries, selon leur expérience et leur intuition, sans l'aide d'ingénieur·euses. Iels creusent, le plus souvent à la pioche, pour récolter des sacs de minerai qui leur rapportent chacun 20 centimes d'euro. Les mineurs les plus expérimentés atteignent des salaires de 200 euros par mois.
Comme les travailleur·euses doivent s'acheter par leurs propres moyens leurs outils de travail (dynamite, habits, etc.), iels travaillent sans masque ni protections adéquates, ce qui menace sérieusement leur santé. En effet, l'air est irrespirable, suffocant et contaminé à l'arsenic et à la silice, notamment.
Cette mine, réputée historiquement pour ses conditions de travail inhumaines, poursuit visiblement l'exploitation des populations locales, d'autant plus que le procédé final, le raffinage, profite non pas à l'économie locale, mais à l'Europe. En effet, la mine de Potosí, ayant relativement peu accès aux technologies de pointe, ne peut produire que des concentrés d'argent. Ceux-ci sont ensuite envoyés dans des usines européennes, asiatiques et étasuniennes. Elles revendent à fort prix le métal raffiné aux pays d'Amérique du Sud. [5]
Mine de Bou-Azzer
Et qu'en est-il des mines qui se disent «responsables» ou «équitables»?

Toutefois, quand on examine ce qui se passe sur le terrain, on observe tout le contraire. Osmane, un employé de la mine décrit ainsi ses conditions de travail :
- « En bas il fait chaud, c'est comme au hammam [...]. On respire la poussière du gisement et la poussière des explosifs. Nous n'avons pas de masques, juste un casque, des bottes, des gants troués. On mange la nourriture qu'on apporte au fond, on s'installe par terre où on peut parce qu'il n'y a pas de place. Beaucoup de mineurs ont des malaises dans les galeries. Mais quand on travaille en sous-traitance, il n'y a pas d'ambulance pour évacuer les blessés. » [23]
La sous-traitance dont parle Osmane est un procédé que les minières utilisent couramment pour économiser sur le dos de leurs employé·es. En effet, cela consiste à engager une autre compagnie pour effectuer une tâche précise sur le chantier. Dans ce cas-ci, la minière Managem engage justement des employé·es en sous-traitance. Elle ne leur offre en général que des contrats à durée fixe, ce qui empêche les travailleur·euses d'avoir accès aux avantages sociaux comme l'assurance maladie, les congés, l'avancement et la retraite. Les accidents de travail, comme les effondrements de galeries, y sont fréquents, et bien souvent mortels. Par exemple, Idriss, un autre employé, a «personnellement dénombré onze morts à la mine de Bou-Azzer entre 2008 et 2022 ». [24]


Et dans le Nord global, est-ce que c'est mieux?
Bien que les deux exemples cités ci-dessus se situent dans le Sud global, il ne faut pas croire que la situation soit radicalement différente au-dessus de l'hémisphère. En effet, même dans le Nord global, les conditions de travail dans les mines demeurent extrêmement dangereuses. Bien que l'automatisation de plusieurs procédés réduisent les risques pour les employé·es, celleux-ci sont tout de même soumis à des poussières et vapeurs toxiques cancérigènes et nocives pour la santé.[26] D'autre part, dans les pays nordiques comme sudistes, ce sont toujours les populations les plus marginalisées (démunies financièrement, autochtones et racisées entre autres) qui assument la plupart des coûts environnementaux et sociaux des mines. Par exemple, en France, ce sont les régions périphériques comme la Bretagne et le Massif central qui exploitent des gisements de lithium, au profit des compagnies automobiles qui construisent des véhicules électriques.[27] De même, les sites souvent ciblés (ou sacrifiés) pour l'exploitation minière sont en territoires autochtones. On peut citer en exemple les mines en Laponie, où vivent les Samis.[28]
Conclusion
Pour résumer, on a vu que :
- Les procédés d'exploitation minière sont essentiellement les mêmes qu'aux siècles précédents. Les changements apportés aux procédés sont encore plus destructeurs des écosystèmes qu'auparavant.
- Les nouvelles technologies numériques permettent d'augmenter l'efficacité des opérations minières. Au mieux, on minera mieux pour miner plus.
- Les mines dépendent encore énormément des hydrocarbures : elles ne sont donc pas zéro carbone.
- Les mines génèrent des quantités faramineuses de déchets (solides et liquides) hautement toxiques et polluants. Aucun équipement minier n'isole complètement et durablement ces substances des écosystèmes.
- La mine est une machine à exploitation humaine. Elle a servi historiquement au maintien de populations colonisées en esclavage et à l'enrichissement des colon·nes. Encore aujourd'hui, l'industrie minière perpétue l'exploitation de classe, raciale et coloniale.
En somme, la mine n'est ni écologique ni responsable : elle est devenue un facteur de dérèglement et d'intoxication globale.
Impacts des mines sur l'écologie[29] :
1) le climat (8% des émissions carbone planétaires)
2) la perte de biodiversité (implantation de mines dans les milieux les plus reculés du monde + destruction d'écosystèmes)
3) la raréfaction des ressources (eau potable, terres cultivables, etc.)
4) les risques sanitaires et environnementaux (risques de catastrophes industrielles + maladies chroniques aux personnes touchées par les rejets toxiques)
En bref, le facteur déterminant de la toxicité et de la dangerosité d'une mine n'est pas sa situation géographique ou historique, mais bien la teneur en minéraux du gisement. Or, plus les concentrations des gisements diminuent, plus on aura besoin d'extraire de grandes quantités de roches et plus les procédés pour les traiter seront exhaustifs et toxiques. Hier comme aujourd'hui, ici comme ailleurs, la mine est une machine à exploitation humaine et environnementale.
Références
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- ↑ Celia Izoard. (2024). La ruée minière au XXIe siècle : Enquête sur les métaux à l'ère de la transition. Éditions de la rue Dorion, p.40-44
- ↑ Ibid., p.41
- ↑ Ibid., p.86, 89
- ↑ Ibid., p.87
- ↑ Ibid., p.87-88
- ↑ Ibid., p.87
- ↑ Ibid., p.89-90
- ↑ Ibid., p.84-85
- ↑ Ibid., p.85
- ↑ Ibid., p.84
- ↑ Ibid., p.66
- ↑ Ibid., p.66
- ↑ Ibid., p.65
- ↑ Ibid., p.188
- ↑ Ibid., p.41
- ↑ Ibid., p.41
- ↑ Ibid., p.67
- ↑ Ibid., p.76-77
- ↑ Ibid., p.76
- ↑ Ibid., p.64
- ↑ Ibid., p.11-13
- ↑ Ibid., p.216
- ↑ Ibid., p.91-92
- ↑ Ibid., p.94
- ↑ Ibid., p.96
- ↑ Ibid., p.101-103
- ↑ Ibid., p.120
- ↑ Ibid., p.119
- ↑ Ibid., p.56